EH BIEN FINALEMENT, CE N'ÉTAIT PAS LA MER À BOIRE !
En deux mots :
Objectivement moyen, le film offre de très belles scènes décomplexées et un moment de cinéma fort sympathique !
Sorti en France le 19 décembre 2019, le film Aquaman est un film de super-héros réalisé par James Wan. Déjà apparu dans Batman v Superman : L’Aube de la justice et Justice League de Zack Snyder, il s’agit du premier film solo du personnage et sixième de l’univers cinématographique DC.
Attention, si vous n’avez pas vu le film et que vous ne souhaitez en aucun cas être SPOILÉ, passez directement à la conclusion 🙂
Le pitch
Arthur Curry, né d’une mère atlante et d’un père “surfacien”, se retrouve au centre d’un conflit entre habitants de la mer et de la terre. Son demi-frère, le roi Orm n’a qu’une idée en tête : réunir tous les peuples sous-marins, prendre le pouvoir en devenant “ocean master”, éradiquer la population vivant au-dessus de la mer et ainsi régner en maître tout puissant (et accessoirement se débarrasser d’Arthur). Voilà. Un joli petit programme en somme, tout ce qu’il y a de plus classique et fidèle aux comics. Vous l’aurez compris, le film va donc suivre les pérégrinations d’Aquaman essayant de résonner son frère et d’éviter de voir son monde détruit.
Un univers artistique fort
J’étais assez intrigué par ce film, surtout au niveau de la méthode de tournage. Un film qui se passe majoritairement dans l’eau doit demander beaucoup de logistique de production. Pour beaucoup tourné en piscine et devant un écran bleu, Aquaman me semble être un pari réussi ! Premièrement en termes de décors : que ce soit dans l’Atlantis ou ailleurs au fond des mers, l’univers aquatique est sublime. De nombreuses couleurs, une poésie visuelle forte et une réelle douceur… on se croirait un peu dans Avatar tout en gardant la grandeur des tableaux proposés par Zack Snyder dans Man of Steel et Batman v Superman. À l’exception de quelques scènes vraiment trop vues (je pense au toboggan menant au premier indice, en plein Sahara, clin d’œil presque forcé aux vieux Indiana Jones), Aquaman est un film très très joli, presque trop par moments tant les couleurs se mélangent créant parfois un effet brouillon nuisant à la lisibilité globale. Mention spéciale cependant pour les agents d’Orm, directement inspirés des stormtroopers, très réussis.
Autre point important du film concernant la proposition artistique : la musique. La bande originale d’Aquaman est extrêmement disparate. À la fois attendue et très surprenante, elle propose quelques morceaux entre retro et électro de très grande qualité permettant d’élever la direction artistique et de permettre à l’univers un peu plus de cohérence. Ce n’est pas parfait, mais c’est assez intéressant pour que j’ai envie d’en voir plus.
Un scénario plein de références
Aquaman, comme presque tout film geek de ces 10 dernières années surfe lui aussi sur la vague des références, clins d’œil et autres fan-services. Mais je dois dire que j’ai été agréablement surpris par la délicatesse et l’ingéniosité de certains, ne tentant pas d’en faire trop. Si le film est parfaitement situé dans la chronologie des films de l’univers DC, plaçant Aquaman juste après Justice League, on apprécie les références faites à la mythologie aquatique au sens large, comme par exemple le livre The Dunwich Horror signé H.P. Lovecraft que l’on peut apercevoir sur la table du père d’Arthur lorsqu’il vient de sauver Atlanna (mais si, vous savez, la scène avec le chien qui regarde fixement Nicole Kidman). Dès ce moment, il était couru d’avance que Cthulu, le Kraken ou encore Karathen (à qui Julie Andrews prête sa voix), appelez-le comme vous le souhaitez, montrerait le bout de ses tentacules. L’univers de H.P. Lovecraft est d’ailleurs très présent dans le film, tant par son champ lexical que par son aspect horrifique proche des classiques de James Wan, réalisateur de Saw, Insidious ou encore Conjuring.
J’ai également noté des références à Indiana Jones et Le Cinquième Élément lors du passage se déroulant dans le désert. Il est d’ailleurs amusant de se rappeler que Pierre Benoit dans son roman L’Atlantide, proposait déjà en 1919 une version où le royaume des atlantes se trouvait non pas sous la mer mais dans le Sahara.
Quid des comics ?
Disons-le rapidement, le film Aquaman ne crache pas sur le personnage de comics, au contraire. Cependant, le film ne suit pas un seul arc narratif mais bien plusieurs ; on pourrait citer Aquaman de Peter David ou encore Aquaman Vol. 1: The Trench du run New 52 de Geoff Johns (directeur de création de DC, scénariste de comics et scénariste du film Aquaman) dans lequel le roi atlante doit combattre le peuple de la fosse, même si on regrette que le long-métrage ne s’intéresse pas plus à leur histoire et à leur origine. Cependant, celle-ci étant assez sombre, il semblait logique pour le film qui cherche à garder tout du long un ton assez léger, de garder ce point pour plus tard. Point trop n’en faut.
D’ailleurs, si le film est très cohérent par rapport aux comics, nous avons toutefois noté quelques petites différences avec ceux-ci…
À l’origine, Aquaman n’est pas le fils d’un gardien de phare mais d’un puissant magicien du nom d’Atlan, qui séduit Atlanna avec sa magie. D’ailleurs Arthur ne s’appelle pas Arthur mais Orin. Le petit garçon dont les cheveux sont blonds, signe de mauvais augure, est alors abandonné sur le récif de la miséricorde. Heureusement, le petit est sauvé. Oui, comme Moïse. Et il sépare la mer en deux. Oui, comme Moïse. Il viendra d’ailleurs après sauver son peuple. Comme Moïse.
Autre différence : le père de Black Manta n’est pas censé être laissé pour mort (puis se fait exploser tout seul dans un sous-marin) mais se fait bien étrangler par Arthur. De même, dans les comics, Black Manta est à l’origine un orphelin atteint d’autisme placé à l’asile d’Arkham de Gotham City. On connaît bien.
Petite fausse note encore, le personnage de Vulko n’est pas censé être le gentil mentor d’Arthur et fidèle soutien de la reine Atlanna, mais le conseiller scientifique en chef d’Atlantis : un terrible traître responsable de la guerre entre les peuples. Cependant, je ne vous cache pas que voir Willem Dafoe dans le rôle de “gentil” m’a fait du bien. On a trop l’habitude de le voir du mauvais côté, ça change. Toutefois, dans les comics, suite au règne parfois compliqué d’Arthur Curry, Vulko finit par être désabusé et part pour une autre ville souterraine. Sait-on jamais, il serait tout à fait cohérent de le voir passer du côté obscur dans un prochain film. Après tout…
Pour finir, dans les comics, Nérée n’est pas le père de Mera mais son fiancé (dans le run New 52), ce qui rend la narration du film plus facile puisqu’il permet de rapprocher artificiellement Mera et Orm, son promis.
Une écriture bancale
Si l’écriture est calquée sur les comics (et plutôt bien d’ailleurs, je n’aurais rien à dire là-dessus), il m’est impossible de passer à côté de quelques lignes de dialogue particulièrement mal écrites. En effet, si le personnage est bourrin et se veut très maladroit (en soit, ça ne me dérange pas du tout, il faut bien donner un peu de profondeur et de personnalité au personnage), quelques punchlines tombent totalement à l’eau (oh, un jeu de mots). En effet, des phrases comme “dans le monde d’où je viens, les larmes partent avec la mer et ne coulent pas” ou encore “il n’y a pas le monde de la terre et le monde de la mer, mais un seul monde” semblent totalement ridicules lorsqu’on regarde le film dont le ton, certes léger, est pourtant clairement porté par un souffle épique très fort qui s’arrête d’un coup, faute de mauvais goût à quelques instants. Rien de très grave, attention, mais sur le coup j’ai eu envie de crier en pleine séance “Sérieux les gars ? Maintenant ?”. S’agit-il d’un cliché maladroit ou d’un cliché volontaire, je me tâte.
Mon avis
Lorsque je sors d’une séance, il devient fréquent que j’ai deux avis divergents : un point de vue subjectif, très personnel du fan-boy qui sommeille en mois, un point de vue objectif car tout article doit permettre de prendre du recul. Objectivement, Aquaman est un film assez moyen, ambitieux et aux thématiques actuelles (l’écologie par exemple) mais parfois mal écrit et à la tonalité proche de ses homologues signés Marvel. Subjectivement, par contre, j’ai passé un très très bon moment et j’ai très envie de revoir le personnage dans un second film.