UN PORTAGE RÉUSSI ET LE PLAISIR ET RETROUVER UN GRAND CLASSIQUE DU PC ?
En deux mots :
En matière de portage raté, ce Neverwinter Nights est un cas d’école. C’est bien dommage, car il s’agit d’un très bon jeu, à la base. En plus de n’avoir que peu de sens sur le plan de l’existence, cette version frôle l’échec critique (aussi appelé fumble, dans le jargon). Si vous n’avez jamais touché à ce jeu de votre vie, n’achetez pas cette version, fuyez pauvres fous !
Neverwinter Nights, c’est quoi ?
Avant de parler de ce désastreux portage sur PS4, Xbox One et Nintendo Switch, parlons avant tout du jeu en lui-même, si vous le voulez bien. Car si cette version ne mérite pas vraiment votre argent, le jeu de base (trouvable sur Steam pour bien moins cher) est une excellente adaptation de Donjons et Dragons et peut même vous mettre le pied à l’étrier pour vous essayer à la version papier.
Sorti le 18 juin 2002 sur PC, Neverwinter Nights est un C-RPG (C pour computer) développé par Bioware, à une époque où mettre “Bioware” et “excellent jeu” dans la même phrase avait du sens.
Comme dit précédemment, Neverwinter Nights est une adaptation du célèbre jeu de rôle sur table Donjons et Dragons. Adaptation, car il n’est pas seulement tiré de l’univers éponyme, il en reprend les règles et les adapte le plus fidèlement possible au support vidéo-ludique, contrairement au MMO free to play du nom de Neverwinter qui se contente uniquement de l’univers.
Le pitch
La ville de Padhiver (Neverwinter en anglais) est en proie à une terrible épidémie baptisée chaleureusement “la mort hurlante”. Personne ne trouve de remède et encore moins sa cause. Les gens meurent les uns après les autres. Le Seigneur Nasher charge sa Paladine, Dame Aribeth de Tylmarande, paladine de Tyr, de trouver un remède. Afin de lui prêter main forte, elle invite des aventuriers à venir à l’académie de Padhiver afin qu’ils reçoivent une meilleure formation et l’aident à sauver la ville. Ouais, en gros… Elle sous-traite, la bougresse !
Comme vous vous en doutez, c’est l’un de ces aventuriers que vous incarnez. Après la création de votre personnage (race, classe, attribution des points de compétence…), vous aurez le choix de faire le prologue, qui est votre passage à l’académie et qui sert de tutoriel, ou de commencer tout de suite.
Je vous recommande de faire le tutoriel, même s’il n’est pas très intéressant, car sinon vous sortirez de l’académie niveau 3 au lieu de commencer niveau 1 comme un vulgaire noob.
À la fin de votre formation, l’académie se fait attaquer ! C’est à ce moment-là que vous apprenez que Dame Aribeth y avait caché des créatures en provenance d’Eauprofonde (une autre ville de l’univers de D&D). De ces créatures, on devait extraire des ingrédients afin de concocter un remède. Les créatures ont profité de la bataille pour s’enfuir dans la ville. Vous aurez pour mission de les retrouver et d’enquêter sur QUI a déclenché cette épidémie et ne veut visiblement pas qu’elle soit soignée.
Le gameplay du jeu et le fonctionnement de D&D
Dans le cas où vous n’avez absolument jamais joué, ou ne serait-ce que côtoyé Donjons et Dragons, je vais très brièvement vous expliquer comment fonctionne la base. C’est INDISPENSABLE pour comprendre le jeu (et on aime vous apprendre des trucs chez My Geek Actu !).
Tout d’abord, il faut comprendre que Donjons et Dragons se joue avec des dés. Lorsque vous souhaitez réaliser une action un minimum complexe, quelle qu’elle soit, le maître du jeu (celui qui va chapeauter la partie et vous raconter l’histoire que vous vivez) va déterminer le score que vous devez obtenir pour réussir. Le plus souvent, cela se fera grâce à un dé à vingt faces, appelé aussi D20. Vos caractéristiques peuvent influer sur le résultat. Les caractéristiques (force, dextérité, intelligence…) ont toutes pour base 10. À chaque palier en nombre pair atteint, elles vous confèrent un bonus de +1 au résultat du dé. C’est donc ce bonus qu’il faut prendre en compte et non le chiffre directement. Comme ceci donc :
10(0)
11(0)
12(1)
13(1)
14(2)… et ainsi de suite.
À noter que si vous êtes en-dessous de 10, il s’agira d’un malus fonctionnant de la même façon. Par exemple, vous voulez enfoncer une porte. Il faudra faire un test de force. Le maître du jeu déterminera alors qu’il faut faire un score de 15 pour réussir. Vous lancez le dé et vous obtenez un 14. C’est donc raté. MAIS, si vous avez 12 en force, alors vous avez en réalité un score de 15, ce qui fait que vous avez réussi !
Et c’est le même principe quand vous attaquez. Vous lancez le dé pour savoir si vous touchez, et ensuite chaque arme a ses propres dés auxquels vous ajouterez le bonus de la compétence qui s’y accorde. Par exemple, une épée longue, c’est un dé à huit faces et une épée à deux mains, deux dés à six faces pour les dégâts.
Sachez que ce principe-là, d’autres jeux vidéo l’appliquent. Comme par exemple l’excellent Knight of the Old Republic (un des meilleurs jeux Star Wars à ce jour, si ce n’est pas LE meilleur).
Maintenant que vous savez ceci, passons à son application dans le jeu. Le jeu se base sur un système de tour par tour automatique. Le jeu s’occupe des jets de dés, des calculs et de tout ce qui s’ensuit. L’action se passe quasiment en temps réel pour le joueur. En fait, les tours s’enchaînent sans que vous ayez à faire quoi que ce soit. Vous voyez un ennemi, vous cliquez dessus et votre personnage ira directement l’attaquer. Il continuera jusqu’à ce que l’ennemi meure ou que votre personnage meure. Si vous souhaitez utiliser une compétence ou un sort, il suffira juste de cliquer sur l’icône des sorts/compétences et votre personnage le lancera à son tour. À tout moment dans le jeu, combat ou non, vous pouvez suspendre le temps. Ce qui va vous permettre de réfléchir à une stratégie, par exemple.
Il y a une petite fenêtre dédiée (que vous pouvez fermer si ça ne vous intéresse pas) en bas de l’écran qui vous indique les fameux jets de dé qui ont été effectués et leurs résultats. Cela permet de voir concrètement ce qui se passe exactement durant la bataille. Les sorts jetés par votre adversaire apparaissent aussi dans cette fenêtre… Enfin, si vous les connaissez. Sinon, il y aura écrit qu’il vous lance un sort inconnu.
En dehors des combats, vous pouvez vous déplacer librement dans un monde semi-ouvert, parler à des PNJ avec des dialogues à choix multiples, résoudre de nombreuses quêtes annexes… Un bon RPG bien classique, en somme.
Il est même possible de parcourir le jeu à plusieurs. Et même de créer vos propres campagnes, si le cœur vous en dit.
Enhanced Edition
La Enhanced Edition (édition améliorée dans la langue de Molière) possède un contenu tout à fait satisfaisant. En plus du jeu de base, elle contient les deux extensions officielles ainsi que les modules les mieux réalisés par la communauté. Bioware les avait distribués gratuitement sur son site à l’époque. Petit bémol : ils sont uniquement en anglais… Donc si vous êtes en galère avec la langue de Shakespeare et sur console (donc pas de mode de traduction) vous n’en ferez rien, c’est dommage.
Mais si ça peut vous rassurer il y a de quoi faire, croyez-moi. La campagne de base est relativement longue. La première extension du nom de Shadow of Undrentide vous proposera de vivre une toute nouvelle aventure, mais plus courte que la première. En effet, elle ne propose que 2 actes contre les 4 du jeu de base.
Et pour finir, la deuxième extension Horde of the Underdark est beaucoup plus intéressante, à mon goût. En plus de proposer une nouvelle aventure en 3 actes, elle est conçue pour être faite APRÈS, pour importer votre personnage du jeu de base ou de la première extension, comme vous voulez. Vous pouvez également en créer un nouveau et dans ce cas, il commencera tout de suite au niveau 15. De plus, vous allez pouvoir expérimenter pleinement les classes de prestige. Ce sont des classes qui ne sont pas accessibles de base. Pour y avoir accès, il faut remplir des conditions particulières, incluant par exemple d’avoir certaines compétences au préalable. Comme sur cette image :
Le portage de la honte ?
Vous l’aurez compris, Neverwinter Nights est un bon jeu. Mais prendre un jeu pensé et conçu pour y jouer clavier/souris et le passer des années plus tard (17 ans plus tard, on le rappelle) à la manette est une pente glissante. N’est pas Larian Studio (Divinity Original Sin) qui veut ! Le problème, c’est qu’ils ont voulu rester au plus près du jeu d’origine. Au point qu’un sentiment de brut de décoffrage se fait sentir… Plutôt que de repenser les interfaces ou les menus pour les adapter, ils n’ont rien touché. C’est un peu comme s’ils avaient fait rentrer au chausse-pied une configuration manette dans les codes du jeu. Ils n’ont même pas pris la peine de retravailler les cinématiques. Elles ne sont pas en plein écran et elles sont pixelisées. Et la plupart ne sont pourtant que des images fixes avec des mouvements de caméra… comme vous pouvez le voir sur l’image ci-dessous :
Et bien évidemment, ils n’ont même pas pris la peine de rajouter une option pour agrandir les textes… Parce que je vous préviens, c’est écrit petit.
Dans la version PC, vous avez une barre de raccourcis en bas de l’écran dans laquelle vous attribuez vos compétences ou objets de votre inventaire. Ici, ils ont purement et simplement enlevé cette barre et attribué un menu de raccourcis rapide sur L2 (si vous êtes sur PS4). Ça marche. Mais ce n’est pas des plus pratiques et c’est surtout beaucoup plus long. De plus, vous allez très souvent devoir suspendre le temps parce que vous ne pouvez pas cliquer sur votre cible pour la sélectionner. Le ciblage se fait automatiquement sur l’ennemi en face de vous. Donc si vous avez quatre ou cinq cibles, bonne chance pour toucher la bonne. PAR CONTRE, quand vous mettez le temps en pause, là vous avez un curseur qui apparaît et vous pouvez enfin sélectionner vos cibles comme il faut. Pour la faire simple, dans les gros combats, si vous faites autre chose qu’attaquer normalement, vous allez suspendre le temps à quasiment chaque action. En solo, cela peut se faire, mais en multijoueurs, cela va rapidement devenir infernal.

Quand vous faites vos emplettes chez un marchand, vous allez aussi avoir un problème similaire. Les menus n’ont pas du tout été repensés pour la manette.
Et le fait de suspendre le temps pour faire apparaître le pointeur va parfois vous être nécessaire. À la longue, ça devient relativement contraignant pour pas grand-chose au final, puisque même un vieux PC basique serait capable de faire tourner le jeu sans soucis. Il n’est vraiment pas gourmand en ressources.
Autre problème, si vous n’avez jamais joué à ce jeu, que vous ne savez pas comment il fonctionne, les actions réalisables… vous n’avez pratiquement aucune chance de vous en sortir face à un maping de touche assez contre-intuitif et pas très très bien expliqué… et qui bugge quand cela lui chante. Parfois lorsque vous essayez d’assigner vos objets et compétences au menu de raccourcis, cela ne fonctionne pas.
Et pour couronner le tout, cette version console est vendue pour la bagatelle de 50€.
Si ce jeu vous intéresse, il est à 28€ sur Steam. En définitive, si vous avez un PC, je ne vois absolument aucune raison d’acheter ce portage. À moins de le trouver pour un prix plus que réduit dans un bac d’occasion.
Voici d’autres screens, si vous voulez avoir quelques visuels supplémentaires du jeu.