Qu’est-ce que la justice ?
Zetman est un manga de type seinen créé par Masakazu Katsura. Publié aux éditions Tonkam la série comporte 20 tomes. On y suit ici l’histoire de Jin Kanzaki et Koga Amagi sur 15 ans.
L’œuvre s’ouvre sur une scène lourde d’interprétation de sens. Une ruelle sombre en pleine nuit, une pluie battante… Un pistolet ruisselant pointé sur un personnage à l’allure d’un démon affalé dans un tas de gravats (qui est celui de la couverture du tome 1) arborant un sourire narquois.
“Où dois-je tirer pour que tu meurs sans souffrir ?”
lui hurle un jeune homme vêtu d’un grand manteau blanc,
“Répond !”
Puis là, grande double page sur la ville sous la pluie et le titre “Zetman” dans le ciel noir. Le manga débute sur un “13 ans plus tôt”. Dans cette petite intro on comprend aisément que ces deux personnages se connaissent et qu’il y a, ou qu’il y a eu un lien fort entre eux et que quelque chose les a poussés à se battre, jusqu’à la mort visiblement.
Avant toute chose je préfère préciser, il y aura quelques SPOILERS mineurs. Il est vraiment très difficile de parler de Zetman et de donner envie de lire sans en raconter un minimum. Le scénario évolue lentement et les révélations sont distillées tout le long. Tout est savamment orchestré et extrêmement bien écrit. Aucune scène n’est inutile, tout est là pour, soit desservir le développement des personnages, soit faire avancer l’histoire.
Le pitch
Dans un futur assez proche (il n’y aucune indication d’époque mais la technologie est un peu plus évoluée que la nôtre), une entreprise du nom de Amagi Corporation organise secrètement des recherches génétiques. Le but est de créer l’avenir de l’espèce humaine, un genre d’homme 2.0 si vous voulez. Après plusieurs années, rien de probant n’a été créé. Un chercheur décide alors d’expérimenter des croisements génétiques avec de l’ADN animal. Plusieurs créatures instables ont été créées suite à cela. Trop éloignées du projet initial, ces innovations ont été rejetées. Cependant, histoire de ne pas perdre trop d’argent, cette voie de recherche a été poussée en parallèle dans le but de créer des monstres qui combattront dans des arènes clandestines telles des gladiateurs. Ces créatures ont été baptisées “players”.
Devenant de plus en plus forts et intelligents au fur et à mesure des générations, les players prennent conscience de leurs conditions et décident de s’échapper. Évadés dans la nature, Amagi Corporation décide de mettre en place un chasseur afin de les anéantir avant que la population ne soit au courant. Une créature surpuissante qui traquerait les players en fuite. Le chasseur est appelé Zet. Le scientifique à l’origine du Zet le conçoit le plus humain possible. Tellement humain qu’il refuse de le voir exploité par Amagi Corp. Tel un père voulant sauver son enfant, le scientifique prend dès lors la fuite en compagnie du bébé pour lui offrir une vie normale loin d’Amagi et de leurs manigances.
L’histoire de Zetman va, dans un premier temps, se dérouler de deux points de vue. On commencera par découvrir Jin sur les 2 premiers tomes puis nous enchaîneront sur l’histoire de Koga. Jin est un jeune garçon d’une dizaine d’années vivant avec son grand-père dans un bidonville. Doté une force surhumaine (mais pas non plus tant démesurée que ça), Jin défend des passants dans la rue qui se font agresser et leur demande ensuite de l’argent en compensation de ces services. Koga est le fils héritier d’Amagi Corporation. Un garçon brillant et d’une extrême bonté qui ne veut pas de l’avenir qui lui est promis. Les faux sourires et l’hypocrisie de la haute société ne l’intéressent pas. Lui il rêve plutôt de devenir un super-héros comme son idole Alphas, personnage du dessin animé de son enfance.
Pourquoi c’est bien ?
Au-delà de son histoire qui extrêmement bien écrite, l’intérêt de ce manga se situe ailleurs. Pour moi le plus gros point fort, ce sont les personnages. Ils bénéficient tous d’un gros développement et passent par plusieurs phases. L’auteur n’a pas hésité à leurs faire subir les pires traumatismes pour les faire évoluer et aller là où ils avaient besoin d’aller. Personnellement je n’avais pas vu un tel soin apporté à l’évolution des personnages depuis Berserk. Si vous avez un minimum d’empathie vous allez probablement avoir les larmes aux yeux par moments. L’œuvre regorge de scènes fortes en émotion, que ce soit dans la joie ou la tristesse.
Et comme si ça ne suffisait pas, les dessins de Masakazu Katsura sont sublimes. Ils sont beaux, les arrière-plans fourmillent de détails, les émotions des personnages sont parfaitement palpables… un vrai plaisir pour les yeux.
Considérée comme terminée, il n’est pas exclu que la série voit une suite arriver dans quelques temps, sous un autre nom, un peu à la manière de Naruto et des Naruto Shippuden. Malheureusement il n’y a aucune information depuis la parution du dernier chapitre à part sur la dernière double page : “Acte 1 ZETAM fin” / “Acte 2 -ZET- Anneau de lumière et de révélation – We will meet again definitely” (Nous nous reverrons certainement). Même si la suite se fait attendre que cela ne vous dissuade pas de plonger dans le manga, ça reste une histoire qui se conclut.
Il y a un anime….
Même si je suis là pour vous parler du format papier, je me dois tout de même de vous dire quelques mots sur l’anime. Très franchement je ne vous la recommande pas ! Si je vous dis 13 épisodes contre 20 mangas vous devriez avoir une petite idée d’où se situe le problème. Le premier souci avec Zetman c’est qu’il est compliqué d’enlever des scènes. Aucune n’est inutile. Et l’autre souci, c’est que d’un manga seinen aux passages poignants, violents parfois et avec un gros développement, on passe à un shōnen basique aux personnages lisses et à l’histoire sympa mais sans plus.
J’avoue avoir découvert l’œuvre en commençant l’anime car je ne pouvais pas me payer encore les bouquins. Et si j’ai trouvé ça pas mal, je sentais que ça n’allait pas assez loin, qu’il manquait quelque chose. En lisant des années plus tard le manga, je ne m’attendais pas à avoir raison à ce point. Tout ce qui fait le sel du manga a été retiré dans la version anime. Donc comme je le disais plus haut, passez votre chemin.
Mon avis
Zetman est une œuvre qu’il faut lire. Personnellement après la lecture, il est arrivé dans mon top 2 des meilleurs mangas que j’ai pu lire. Une histoire bien écrite, des personnages attachants, des beaux dessins. Que demande le peuple ? Masakazu saura vous questionner sur le sens de la justice de la même manière qu’il l’a fait avec ses personnages à travers ce manga mature sombre et parfois très cru.